Kallis et Alyana
Le monde est petit
13 septembre 2011
Aujourd’hui, j’avais réussi à me lever. Les derniers jours depuis la mort de Kyle avaient été horribles : je n’avais même pas pris la peine de sortir de ma cellule, restant couchée sans prendre la peine de voir qui que ce soit. Enfin, c’étaient surtout les autres qui venaient me voir. Et je les envoyais tous chier les uns après les autres. Honnêtement, ils auraient pu me chasser, vu le peu de conversation que j’avais. Hershel pourtant, réussissait à me faire parler. Il jouait en quelques sortes, le rôle de psy. Il tentait de me rassurer en me répétant que ce n’était pas de ma faute si Kyle était décédé. Et pourtant, j’étais toujours persuadée que c’était le cas.
Les cauchemars s’intensifiaient, jour et nuit. Ce ne fut que la nuit dernière, quand Daryl resta avec moi que je dormis enfin en paix. Bon lui, je n’en savais trop rien par contre.
Bref. Ce matin, je m’étais réveillée doucement, sortant d’un sommeil sans rêve. Et ça faisait du bien. Un grand bien. Ce fut sans surprise que je découvris que Daryl était parti. Evidemment, il n’allait pas me couver la journée non plus. Lentement, je m’extirpai de mon lit et me mis maladroitement debout. J’avais l’impression de ne plus avoir fait ça depuis des années. Je me mis face au petit lavabo de ma « chambre » et m’examinai avec effroi : j’avais tellement changé... mon visage était creux, des cernes tombaient sous mes yeux et mes clavicules donnaient l’impression d’être sur le point de se détacher à tout moment. Une maigre main passa sur mes joues, pour vérifier si c’était bien moi. Un souffle de surprise s’échappa de ma bouche.
« Oh bah… ! »Je me redressai un peu mieux. Et soudain, la fatalité me frappa : pendant plus d’un an, je m’étais sacrifiée pour Kyle, et il le savait. Pendant cette longue année, il insistait pour que je mange plus, pour que je dorme, que je me repose… que je vive un peu pour moi. Mais j’avais été plus têtue que lui. C’était lui qui avait mangé, dormi, vécu. Alors qu’il savait. Peut-être que moi aussi, je le savais, au final. Au fond, j’avais agi comme une enfant. Tout s’emmêlait dans ma tête : je ne savais plus trop où j’en étais… mais dans le bon sens du terme. J’avais l’impression d’ouvrir les yeux. Maintenant, il fallait que je me remette en question. Ça n’allait pas être bien compliqué : maintenant, il fallait que je survive pour moi-même. J’étais sûre que c’était ce qu’il voulait –et depuis le début, en plus.
Après quelques secondes d’hésitation, je passai l’entrée de ma cellule pour me retrouver en dehors. Beaucoup de gens étaient à l’intérieur, et je compris rapidement pourquoi : le vent tapait avec une force à couper le souffle, sur les fenêtres de la prison. Il fallait même avouer que c’était assez angoissant, surtout que l’endroit était juste énorme, et que le bruit se répercutait avec puissance. Après avoir descendu les escaliers en métal, je lançai un regard vers les fenêtres les plus hautes : les nuages à l’extérieur étaient d’un gris profond, presque noir. Soudain, je fus tirée de mes rêveries par Hershel. Il semblait clairement ravi de me voir sortie, et me demanda si j’allais bien. Nous entamâmes une courte conversation, et le vieil homme me proposa de visiter par moi-même la prison. Je repris donc ma « balade-découverte » seule. Je ne l’avais pas encore remarqué, mais il y avait pas mal d’enfants, ici. A tous les coups, Kyle se serait bien plu avec eux. Ah ! J’allais avoir du mal à le chasser de ma tête… pour faire un deuil, il parait qu’il faut au moins un an… ce n’était pas gagné, en somme.
La prison était un endroit qui avait du potentiel : tout le monde travaillait à rendre le lieu plus agréable à vivre et j’étais sûre que d’ici peu, il serait tout simplement parfait. D’après ce que j’avais compris, les survivants étaient en train d’aménager une bibliothèque, ainsi que des douches. Par ailleurs, il y aurait bientôt de quoi faire à manger, etc. Un petit paradis, en gros.
Soudain, j’arrivai près d’une cellule légèrement en retrait. J’y jetai furtivement un œil, continuant ma route puis m’arrêtai vivement pour me tourner totalement vers l’intérieur de la cellule. A l’intérieur, il y avait quelqu’un. Et ce quelqu’un ne m’était totalement inconnu. Une femme. Cette femme ! Comment oublier son visage ? Elle m’avait dégoûtée à vie du service des urgences !
Mais elle semblait bien mal en point… grosse comme un ballon, elle était enceinte jusqu’au cou. A côté de ça, elle semblait aussi maigre que moi, si pas plus. Etonnée, je ne pus m’empêcher de la dévisager, sans prononcer un mot.
© Daph