Mission réussie pour Miss Skullnox. Sa mission était de lécher quelqu'un ou quelque chose.

Elle gagne donc 30 points RP.

Franchement, elle commençait à sérieusement m’inquiéter ! Elle répondait pas à mes questions et si ça se trouvait, elle avait quinze ans au lieu de dix-huit ou dix-neuf ! Putain l’air con quoi ! Il était vrai que les meufs avaient l’air de plus en plus âgées, alors qu’elles étaient presque sorties du berceau. Mais alors depuis cette épidémie… ça vieillissait pas mal les gens hein, notre époque actuelle ! Je me sentis pâlir. Bon, j’aurais aucun souci avec la police, ça c’était clair, mais c’était plutôt pour ma propre morale. Bah ouais, j’avais une morale, moi !
Je la vis prendre sa conserve, l’air de rien, et commencer à manger, toujours l’air de rien. Ah, elle avait bien gagné là : je la ferais plus chier jusqu’à ce que je connaisse son âge. Seulement, elle m’avait pas dit son vrai nom –ou alors ses parents avaient vraiment des goûts de chiottes– alors son âge, je pouvais me l’enfoncer dans le cul, j’en étais sûr. Putain, c’était pas drôle ça ! A mon tour, je recommençai à bouffer, l’air ronchon, le regard baissé sur mon repas. J’aimais pas quand on me menait en bateau : j’avais pas été méchant en plus ! J’étais juste… un peu lourd !

Puis, je jetai un coup d’œil vers Fantôme, pour rabaisser les yeux sur ma boite de… je relevai le visage rapidement. La jeune fille semblait pétrifiée, étonnée. A mon tour, je le fus. Je regardai même derrière moi au cas où un zombie ne se pointerait pas par surprise. Mais non, tout était désert, et de toute façon, Clochard était tranquille comme le dernier des bienheureux –triste, pour un chien qui venait de perdre sa maîtresse…
Soudain, un léger filet de sang perla au coin des lèvres de l’adolescente, et s’étira le long de son menton. Cette fois, ce fut moi qui eu l’air étonné. Quoi, elle avait fait quoi la gamine là ?? Je battis des paupières quelques instants et sans crier gare, la brune cracha une gorgée de sang sur mes genoux. Littéralement, sur mes genoux. Littéralement, une gorgée. Bon, je savais pas trop ce qu’elle avait foutu, mais à première vue, elle s’était coupée. Je me levai d’un bond et fit quelques pas vers ma voiture. J’ouvris à la volée la porte arrière, chopai un vieux T-shirt et revins sur mes pas.

« En fait, t’es vraiment un boulet ! T’as essayé de bouffer un couteau pendant que j’te regardais pas ? »

Je m’accroupis près de Fantôme et déchirai le T-shirt blanc, d’un simple geste. Je le tendis à la gamine en soupirant et en levant les yeux au ciel. C’était le signe que j’étais vraiment abasourdi… dépassé… énervé ? Ouais, presque. Elle se foutait de ma gueule et puis je devais quand même l’aider. Ah putain, ces jeunes américaines… !

« T’inquiète pas, il est propre, je l’ai pas encore mis depuis que l’épidémie a commencé. Et il était tellement vieux… j’me demande bien pourquoi je l’ai pris avec moi aux US. »

Je fis une pause, l’air pensif et lançai en haussant les épaules :

« Bah, p’t’être que je savais que j’allais rencontrer une gamine de douze ans qui allait s’entailler la gueule avec je ne sais quoi, en fait. Bon, t’as fait quoi ? »

Non mais sérieux, elle avait fait quoi là, la Fantômette ? Une chose était sûre, elle venait de vomir une gerbe de sang à mes pieds. C’était dégueulasse, sérieux ! Mais bon, il m’en fallait plus pour tourner de l’œil, surtout à notre époque. Et heureusement pour elle, d’ailleurs. Et pour moi : on aurait vraiment eu l’air malin hein, elle, à pisser le sang, et moi à tomber dans les pommes pour une connerie pareille ! Abasourdi, j’eus quand même le bon sens de rejoindre la voiture et de prendre un T-shirt –encore propre, évidemment !– pour le donner à la jeune fille. Au préalable, j’avais tout de même réussi à le déchirer. Au moins, ça lui faisait quelques morceaux, si l’hémorragie était trop forte. Et si ça ne suffisait pas… ? Bah, on se retrouverait comme deux cons, avec Clochard. Puis ça me ferait mal au cul de devoir butter deux fois quelqu’un dans la même journée. Tout de même : j’étais pas comme tous ces barbares qui couraient les rues maintenant… il y avait un petit cœur qui battait dans cette carcasse ! D’ailleurs, ça me faisait énormément de peine de penser à Elisabeth. Pourtant, nous ne nous connaissions pas tellement… enfin, encore heureux cela dit : si Elisabeth était une amie de longue date, je ne sais pas dans quel état je serais, maintenant. En vérité, je n’avais pas fort envie de le savoir.

Bref, je tendis à la jeune fille ce T-shirt déchiré, en lui assurant qu’il était propre. Quelques secondes auparavant, je m’étais pas gêné pour lui avouer qu’elle était un boulet. Non mais sérieux, elle avait essayé de bouffer un couteau ou quoi ? Parce que franchement, même en voulant faire pareil, j’étais pas très sûr de pouvoir faire aussi bien. Mais bref. Bon en tous cas, elle avait pas l’air ravie non plus de la situation. Tu m’étonnes en même temps.
Je la vis poser mon vieux T-shirt sur sa langue ensanglantée. Rapidement, le tissu blanc prit une teinte rouge écarlate. Mais au moins, c’était plus impressionnant que grave. C’était vrai quoi : si c’était si grave que ça, elle serait déjà tombée dans les pommes, nan ? Soit. Tout haut, je me posai la question de savoir pourquoi j’avais bien pu prendre ce fichu T-shirt avec moi, même si c’était tout de même une sacrée chance que je l’ai eu sous la main. Après avoir observé pendant quelques secondes l’adolescente, je finis par lâcher que c’était sûrement parce que je savais que c’était que j’allais rencontrer une « gamine de douze ans ». Une façon de la titiller quoi ! Normal, nan ? Je suivis cette hypothèse de la question de savoir « comment elle s’était fait ça ». Question très pertinente, je trouvais.

Tout de même, je fus content de mon effet, car la Fantômette rit doucement à ma remarque. Le T-shirt compressant toujours sa petite langue rose –ou dans ce cas, rouge–, elle me répondit quelque chose que… ouais bon, c’était pas facile à déchiffrer. Tout ce que je compris c’était qu’elle avait dix-sept ans, et qu’elle me remerciait. Déjà pas mal, comme traduction. Je haussai un sourcil et m’esclaffai légèrement :

« Ouais euh… j’t’ai pas très bien compris, m’enfin ! T’es une grande fille alors, tu devrais pas te blesser comme ça ! »

Je me redressai. Mieux, je me relevai en bâillant. Il commençait à se faire tard, et on allait bien devoir –que la gamine le veuille ou non– s’entasser dans mon pick-up. Il fallait tout de même voir le côté positif : c’était tout de même bien mieux et bien plus chaud –et plus sécurisant quoi !!– que de dormir à la belle étoile, nan ? Je jetai un coup d’œil à la brune et lui lançai d’un ton goguenard :

« Bon alors Fantômette ?! T’es remise de tes émotions ? On va pioncer dans la bagnole ? Et sérieux hein… j’insiste : je tiens pas à ce que tu te les gèles dehors. Et à ce que tu te fasses bouffer. Dehors. »

Vraiment, c’était la première fois que je rencontrais quelqu’un d’aussi maladroit. J’aurais pas pu faire mieux qu’elle. Nan en fait, j’aurais jamais réussi à attendre un niveau pareil. C’était fou quand même : j’avais jamais vu que des gamins se couper la langue comme ça.
Bref, le T-shirt comprimant sa plaie, elle me balança qu’elle avait dix-sept ans, et d’autres trucs, aussi. Et d’autres trucs, que je ne compris pas, par contre. Elle ne releva pas ma pique concernant son âge. En fait, elle ne releva rien, ne prenant même pas la peine de répéter ce que je n’avais pas compris. Sale gosse. Malheureusement, je n’avais pas vraiment la force de lui demander de répéter. D’ailleurs, je me relevai doucement, et après avoir demandé à la Fantômette si elle s’était remise de ses émotions, lui proposai qu’on aille dormir dans la voiture. En réalité, ce n’était pas une proposition : elle n’avait pas le choix. Je ne tenais pas vraiment à ce qu’elle dorme dehors et se fasse attaquer dans son sommeil. Rien que de penser à ça –alors que je venais de perdre Elizabeth– j’en eus froid dans le dos. Alors si vraiment, elle se tapait dehors pour dormir, je n’arriverais pas à fermer l’œil de la nuit.

Je vis l’adolescente prendre un temps de réflexion. Quoi, elle hésitait sérieusement à dormir dans la voiture ? Mais elle était complètement folle, ma parole ! Puis comme par miracle, elle se leva, tenant son arc dans une main, mon vieux T-shirt dorénavant imbibé de sang dans l’autre, compressant toujours sa langue meurtrie et elle me dépassa comme une fusée, courant presque jusqu’à la voiture. Clochard quant à lui, se releva doucement et, alors que je rejoignais Fantômette, se mit à trottiner tranquillement à mes côtés. Elle avait déjà ouvert la portière avant et déposé ses affaires sur le siège. Toujours avec son T-shirt sur la langue, elle accepta enfin ma proposition, à condition de dormir devant. Sérieux ? Elle voulait dormir devant ? C’était comme elle voulait. Moi après tout, je préférais dormir sur la banquette arrière : il y avait plus de place et le frein à main n’allait pas me déranger. Je haussai donc les épaules et finis par lancer :

« Ouais ok, si tu veux ! »

Et pour ponctuer mes mots, j’ouvris la portière arrière. Clochard s’invita dans le pick-up sans demander son reste. Je montai dans le véhicule, presque en synchro avec la Fantômette et chopai deux couvertures, à côté de moi. J’en proposai une à ma collègue :

« Tiens, t’en veux une ? Je dépense pas d’essence en chauffage hein ! »

Fallait pas déconner non plus !