Vous savez comment les pubs vantent tout ce qui est petit ? "Petit mais puissant". Il n'y a pas que ça, il y a aussi les proverbes, "Tout ce qui est petit est mignon." Avec ces 1 mètre 70 et ces 60 kilos tout mouillés, Romilda est petite mais puissante avec un corps musclé par des années d'arts martiaux et de yoga. Les autres survivants ont tendance à la sous-estimer ce qui joue en sa faveur car personne ne la voit comme une menace. Elle a une longue chevelure brune qu'elle garde attaché depuis l'épidémie car elle a vu trop de femmes se faire avoir par des walkeurs car leurs cheveux étaient à portée de main. Avant que tout ce bordel commence, les gens aimaient lui répéter que ses yeux claires et ses fossettes enfantines étaient ses plus grands atouts. Aujourd'hui, ses yeux sont plus souvent verts foncés que clairs, signe de son sombre état d'esprit et ce ne sont plus ses fossettes qui marque son visage mais les plis de son front. Il faut dire qu'elle passe plus de temps à froncer les sourcils qu'à sourire ces derniers temps.  

Romilda est la jeune femme que tout le monde s'attends à voir s'effondrer au moindre problème, au moindre obstacle. Elle a ce visage enfantin qui semble appeler à la naïveté. C'est pourtant celle qui n'a jamais craqué depuis que tout le bordel a commencé. Elle sait que si elle craque, elle sera incapable de se reprendre, alors elle se montre forte et déterminée. La brune est caractérielle et l'épidémie n'a fait que renforcé ce trait. Son sarcasme est sa plus grande défense contre l'humain. Elle n'aime pas s'attacher car elle sait que chacun de ceux qui l'entoure pourrait mourir dans l'heure qui suit.
Une fois le masque froid passé, Romilda est une jeune femme gentille qui ne cherche qu'à protéger les survivants du lycée. Elle a toujours la parole réconfortante pour les plus jeunes et le mot drôle pour détendre les plus âgés.
Cependant, depuis la mort de Luke, une nouvelle facette a vu le jour chez elle. Une facette sombre et qu'elle cache aux gens qui l'entoure. Une facette qui fait que chaque coup envoyé aux walkeurs, chaque mort qu'elle tue à nouveau, la remplit d'un plaisir meurtrier.

Romilda Faye Artner, née un 16 septembre 1989 à 20h précise, alors un minuscule bébé d'à peine 30cm pour 2 kilos 100grammes dans une famille de classe moyenne. Bébé médicament censé redonner une chance au couple de ses parents suite à la mort de leur enfant aînée à l'âge de 4 ans par la faute d'un chauffard.
Lorsqu'on l'avait tendu à son père celui-ci avait regardé le médecin d'une manière signifiant clairement "Quelle est cette chose ridicule que vous me tendez ?". Il était à peu près aussi improbable pour ce géant d'1m95 d'avoir une telle crevette pour fille que pour les Etats-Unis se fassent attaquer sur leur territoire. Et pourtant.
Le nourrisson mesurait la moitié de l'avant-bras de Charlie Artner et le coeur de celui-ci fut pris d'assaut par un amour foudroyant à peine la main du bébé se referma sur son petit doigt.
Pour la mère de Romilda, Emilia Artner, le charme ne fut pas aussi effectif. A vrai dire c'est à peine si elle se soucia de l'existence de sa fille les premiers temps. Elle qui avait été d'une gaieté et d'un bonheur constant pendant toute sa grossesse fut frappé par une dépression. Le baby blues. Si les médecins avaient rassuré son mari en lui assurant que ce n'était que passager, Charlie Artner ne s'attendait pas à ce que ce passage s'éternise. Romilda fêtait déjà ses 1 an que sa mère était incapable de la prendre dans ses bras plus de quelques secondes. Combien de fois Charlie était-il rentré chez lui le soir pour trouver sa fille hurlant à plein poumons dans son lit et sa femme enfermée dans sa chambre le visage enfoui sous un coussin ? Il ne les comptait plus. L'absence de présence maternelle ne renforça que plus le lien qui unissait Romilda à son père et personne ne fut étonné en entendant que le premier mot de l'enfant était "papa".
A l'âge de 3 ans, Romilda était une enfant totalement éveillée qui connaissait déjà l'alphabet, pouvait compter jusqu'à 50 et savait écrire son prénom. Émerveillé et à la fois effrayé par le potentiel de sa fille, Charlie ne faisait que plus attention à elle au grand agacement de sa femme chez qui la dépression s'était transformée en une animosité pour sa fille. Trop bruyante, trop caractérielle, trop gourmande, pour sa mère Romilda était de trop. Le bébé médicament s'était avéré trop présent à son goût. Elle était incapable de la regarder sans penser à son autre enfant, son autre fille qu'elle avait tant aimée et qu’elle ne verrait jamais grandir. Elle ne comprenait pas comment son mari pouvait être aussi aveugle et se concentré sur cette imposture. Ce qu'elle ne manqua pas de lui dire et entraîna la plus monstrueuse disputes que le foyer des Artner connu.

"Comment peux-tu dire une chose pareille ? Tu l'as porté dans ton ventre pendant 9 mois, tu lui as donné la vie. C'est notre fille Emilia, notre fille !"
"Ce n'est pas.. Ce n'est pas notre fille.. Faye était notre fille, mais elle tu l'as oublié depuis longtemps ! Elle l'a remplacé dans ton coeur, tu l'as oublié. Seigneur, comment as-tu pu oublier la chair de ta chair ?"
"Faye est morte Emilia ! Il ne se passe pas un jour sans que je pense à elle. Je la vois dans chacun des sourires de Romilda, je l'entends dans son rire mais elle est morte et rien de ce que tu feras ne nous la ramènera. Romilda est vivante et elle a besoin d'une mère, pas d'une femme endeuillée qui se raccroche au spectre de son enfant décédée."

1 mois plus tard, Emilia fit ses valises et quitta le domicile familial.


En grandissant, Romilda entendit deux types de discours autour d'elle. D'un côté que son père était un ange, un homme au courage sans limite qui avait su faire face à la mort de sa fille aînée et au départ soudain de sa femme pour s'occuper de sa benjamine, le tout sans jamais s'être plaint une seule fois; et de l'autre qu'il était un homme froid et mystérieux qui restait fermé et qui ne divulguait rien sur lui ou sur sa vie personnelle. Certains l'accusaient même d'avoir fait fuir sa femme en s'étant mis à boire après la mort de leur premier enfant. Bien entendu la première version était émise par les mères de ses camarades d'école qui le regardait avec admiration, et parfois - un peu trop souvent d'ailleurs - avec désir, et la seconde par leurs maris jaloux de l'attention que Charlie Artner récoltait sans même y faire attention. Romilda elle savait qu'aucune de ces deux versions n'étaient réelles et cela, parce que son père le lui avait dit par lui même. Il n'était ni un saint, ni un pêcheur. Il disait souvent qu'il n'était qu'un homme qui se pliait au destin que lui avait tracé Dieu. Il avait la foi et regrettait que Romilda n'ait pas la même. La brune n'avait jamais été du genre à s'asseoir et à attendre que les choses se passent. Elle refusait qu'on lui dicte ce qu’elle avait à faire aussi elle s'énervait souvent contre la résignation de son père devant sa vie. Contrairement aux adolescentes de son âge, elle aurait aimé que son père refasse sa vie. Bien qu'il ne lui ai parlé que très rarement de cette mère qui les avait abandonné tous deux, Romilda savait qu'elle avait laissé un trou béant dans la poitrine de l'homme et elle aurait aimé qu'il trouve quelqu'un pour panser les plaies et boucher cette fissure. Il avait beau dire qu'elle était tout ce qu'il lui fallait, tous deux savaient qu'un jour elle prendrait son envol et elle ne voulait pas le laisser seul. Elle ne voulait pas qu'il pense qu'elle l'abandonnait comme sa mère.
Cette mère qu’elle ne connaissait même pas. Il paraît qu'elle lui ressemble beaucoup. En même temps, qui ira dire qu'elle ressemble à son père avec ses 60 kilos et ses 1 mètre 70 ? Romilda n'a jamais vu sa mère qu'en photo et, s'il est vrai qu'elles ont des traits en commun, elle refuse de s'admettre une quelconque ressemblance avec sa génitrice. Après tout, qui aimerait avoir des points commun avec une lâche ?
Au niveau scolaire, Romilda a toujours été une excellente élève sans jamais avoir besoin de se fouler. Elle a d'ailleurs sauté une classe en primaire de par ses facilités. Son père a toujours voulu qu’elle fasse des tests pour déterminer son QI, persuadé qu'elle était beaucoup plus intelligente que ce qu'elle ne laissait paraître mais Romilda a perpétuellement refusé. Elle n'avait pas envie qu'on la sorte de son petit quotidien pour la mettre dans une école remplie de petits génies qui la feraient se sentir stupide. Au moins, là où elle était, elle était assurée de valoir mieux que les autres. C'était une pensée rassurante au milieu de tous ses élèves à la vie stable et à la famille bien rangée. Comme si on ne lui faisait pas déjà assez sentir qu'elle était différente avec son histoire familiale. Elle avait le droit aux tons doucereux des parents de ses amis lorsqu'elle allait chez eux. A croire qu'elle avait le cancer.
La jeune femme n'avait jamais compris pourquoi le passé devrait déterminer son présent, voir son futur. Après tout, elle portait déjà des signes de ce passé. Il suffisait de voir son prénom. Romilda était le prénom de sa grand-mère décédée, Faye le prénom de sa soeur, décédée également. A se demander quand est-ce qu’elle disposerait d'une vie à elle.
Ce souhait fut exaucé peu après ses 18 ans. Le lycée et ses histoires futiles derrière elle, elle partit pour Atlanta pour suivre ses études supérieures. Elle qui avait toujours aimée la littérature et qui pouvait rester plongée dans un bouquin pendant des heures entières se lança dans des études pour devenir professeur d'anglais. Romilda avait connu pendant sa scolarité une professeur de littérature géniale qui lui avait appris qu’elle était plus que ce à quoi elle se réduisait. Elle lui avait donné l'envie de voir plus loin, l'envie de se construire hors des a priori de sa ville natale. A présent, elle voulait pouvoir donner ces opportunités à d'autres jeunes qui étaient perdus comme elle l'avait été.  
C'est pendant ses études supérieures qu'elle rencontra Luke. Charmant rebelle, il poursuivait des études de journalisme et lui fit découvrir la vie sous un tout autre angle. Il la poussait jusqu'à ses limites, lui faisait vivre des aventures plus folles les unes que les autres, lui apprenait à vivre, à vivre réellement, intensément. Il l'avait même fait se mettre aux arts martiaux et au yoga. Il avait changé son mode de vie. Elle était constamment hors d'haleine et elle aimait ça.
A la fin de ses études, elle retourna dans sa ville natale et à son plus grand étonnement, Luke la suivit. Romilda ne s'attendait pas qu'un garçon aussi imprévisible et indépendant ne la suive et pourtant, il le fit. Il trouva une place au journal local et elle obtint une place comme professeur de littérature au Franklin High School. Son père, Luke, un emploi et un groupe d'amis à ses côtés, elle avait enfin trouvé un équilibre.


Et puis l'équilibre s'était troublé, comme il fallait s'y attendre. Un jour Luke revint du journal avec un air froissé. On lui avait parlé d'une sorte d'épidémie qui se répandait rapidement au nord des Etats-Unis et qui, il parait, faisait revenir les morts à la vie. Il avait beau avoir énoncé ces faits sur un ton badin, Romilda voyait sur son visage que cette histoire le laissait perplexe. Et elle aussi. Au fil des jours, les journaux parlèrent de plus en plus de cette info, jusqu'à ce qu'une alerte nationale soit lancée.
Petit à petit, la ville commença à s'éteindre. Dans les premiers temps ça avait été l'agitation totale, tout le monde faisait des réserves, puis plus rien. Les rues étaient vides et le silence total. Pourtant, Romilda n'avait encore rien vu de ce que les autorités avaient reportés. A croire que leur ville n'avait pas été encore touché. Luke et elle commencèrent à se détendre et à reprendre une vie normale. Ce fut la première et dernière erreur qu'ils commirent.
C'était un jour de mai. Le genre de jour chaud qui donnait envie de se poser au bord d'un étang et de profiter du temps. C’est ce que les deux jeunes gens firent. Tout allait bien jusqu'à ce que des bruits étranges se fassent entendre un peu plus loin dans les buissons. Romilda, peu rassurée, chercha à convaincre Luke de rentrer. Ce dernier lui, voulant lui montrer que ce n'était sans doute qu'un animal se dirigea vers le buisson. La brune sentait un mauvais pressentiment lui tordre les entrailles et lui répétait de revenir. Il aurait dû l'écouter. Il aurait dû revenir. Il n'en avait fait qu'à sa tête, comme d'habitude. C'était sa mentalité de rebelle. Elle vit son visage se déformer avant d'entendre son cri. Et elle vit les mâchoires du monstre se fermer sur sa gorge avant d'avoir compris ce qu'il se passait. Incapable de bouger elle resta figée sur place pendant que Luke se débattait et lui criait encore de partir, de s'enfuir pendant qu'elle en avait encore le temps. C'est ce qu'elle fit après de longues minutes. Lorsqu'elle était rentrée chez elle, elle entendait encore les râles du walkeur et les gémissements de Luke qui se mélangeaient dans sa tête dans une cacophonie infernale.
La première personne qu'elle appela fut son père mais il n'y avait plus de tonalité. Préparant des affaires de ses mains tremblantes, elle quitta la maison aux souvenirs qui lui broyaient le coeur et se jeta dans sa voiture. Lorsqu'elle passa devant la maison de son père elle constata que la porte de celle-ci était ouverte. Romilda fit rapidement le tour de la demeure couteau à la main et constata qu'il n'y avait aucune trace de lui ou de son... cadavre. Pourtant, elle savait aussi qu'il ne serait jamais parti sans elle. Elle ne pouvait plus qu'espérer qu'il avait été pris en main par les autorités.
Son prochain stop fut le lycée. Son objectif initial avait été de rassembler quelques affaires pouvant lui servir avant de partir, probablement pour rejoindre la maison de campagne familial. Pourtant, lorsqu'elle vit tous ces réfugiés, elle ne parvint pas à remonter dans sa voiture. Après tout, elle avait choisi ce job pour aider les autres. Et elle savait qu'elle en serait pas capable de continuer toute seule. Elle se précipiterait dans un ravin avant d'atteindre sa destination. Il fallait qu'elle reste occupée, qu'elle se rende utile pour oublier les événements. Pour oublier la mort de Luke, pour oublier la disparition de son père, pour oublier que plus rien ne serait pareil.
Pour oublier qu'elle était repartie de zéro, qu’elle redevenait la femme qu'elle était avant de rencontrer Luke. Pour oublier qu'elle en était à nouveau réduite à survivre.